Je revois Mathilde une 3e fois. Elle a convenu d’une date opératoire. « Très au fait » de la chirurgie du visagepar internet, elle revient avec des questions précises.
- Pourquoi un lifting avec SMAS ?
- Y a t’il un risque à réaliser une chirurgie des paupières (blépharoplastie) en même temps ?
- Et les poches sous les yeux ?
- Pour mon cou relâché et les cordes platysmales (les 2 traits verticaux sous le menton) ?
- Et les cicatrices ?
- Êtes-vous sûr que je reprendrai le travail à 3 semaines ?
Et moi, une question :
« Où en êtes-vous de l’arrêt du tabac ? »
Bien sûr j’opère des fumeuses (modérées) mais les risques des grosses fumeuses sont :
- les cicatrices disgracieuses,
- le teint et la qualité du résultat.
La peur récurrente des patientes candidates à un lifting du visage est de ne surtout pas avoir l’air tiré, le regard figé, que le chirurgien ait trop tiré la peau. Les femmes veulent rajeunir mais tiennent au fameux « naturel ».
Reprenons le mécanisme du vieillissement du visage
D’abord jeune, le visage a une plénitude, il est globalement harmonieux, que l’on soit plus ou moins enrobé. Il n’y a pas de discontinuité entre les pommettes, les sillons nasogéniens, les joues. C’est ce que l’on appelait le « baby face ».
Les sourcils sont horizontaux ou légèrement en arc de cercle. Le front est plutôt lisse, les rides inter sourcilières (rides du lion) sont apparentes aux seules mimiques. Les tempes sont en harmonie avec le reste. La bouche est pulpeuse, bien dessinée (arc de cupidon, philtrum). Le nez a sa plénitude, il n’y a pas les rides sur la glabelle et latéralement (rides du lapin). Les mimiques du rire ne montrent que très peu de contracture des muscles orbiculaires (patte d’oie). Le menton est tonique, l’ovale parfaitement dessiné, le cou lisse et tendu. On a l’air fier.
Avec le temps progressivement le front se plisse. Les muscles peauciers se contracturent. Les rides de la glabelle (rides du lion) et des pattes d’oie se creusent. La région temporale se vide, de même que les joues. Les rides du visage se creusent. Les sillons nasogéniens sont marqués. Des bajoues apparaissent. L’ovale se détend. Le cou se flétri et les cordes platysmales apparaissent. La peau est plus fine.
Le cas de Mathilde et ma technique opératoire
Concernant Mathilde, la chirurgie doit être SÛRE, le résultat efficace, pérenne, naturel. Il doit restructurer ses sourcils, ses pommettes, illuminer son regard, traiter ses volumes, graisseux en particulier. La lipostructure le permet.
Le tabac a affiné sa peau, de façon accélérée, prématurée, son teint est terne. Elle a fait un gros effort sur sa consommation tabagique. La carence oestrogénique liée à la ménopause aggrave les choses. La graisse (sa propre graisse autologue) outre le traitement des volumes, a aussi une action nutritive de la peau, améliore sa qualité. Elle doit être déposée (greffée) de façon très délicate, parcimonieuse dans des endroits vascularisés non décollés par la chirurgie. Le front (5 à 10cc), les sourcils (1 à 2cc de chaque côté et les coussinets de Charpy), sur le nez très légèrement (2cc), les pommettes hautes (2 à 5cc de chaque côté), sur les lèvres (3cc), les plis d’amertume (2cc au niveau des muscles triangulaires du menton), éventuellement l’ovale sur la partie interne, voire les lobes d’oreilles. Et bien sûr, la vallée des larmes selon le geste chirurgical effectué.
Lorsque la peau des joues est fripée, une remontée en bloc par un lifting profond (deep plane rhytidectomie) n’aura pas le résultat de rajeunissement souhaité. C’est pourtant le cas, chez les patientes un peu plus âgées avec une ptose marquée, où la peau a suivi, sans être plissée de façon exagérée.
Le SMAS (Système Musculo Cutané Aponévrotique Superficiel), décrit par les français Peyronie et Mitz, est une fine couche de tissu située dans un plan de glissement au dessus des muscles masséters, muscles de la mastication) jusqu’au modiolus (muscles des lèvres). Son décollement, geste délicat, étendu permet de le retendre, d’en réséquer une partie. La peau suit, sans décollement superficiel. Les rides sont donc plus étirées sur une structure tissulaire plus ferme.
Les photographies pré-opératoires sont un indice précieux pour déterminer les vecteurs de tension, analyse fondamentale, pour un résultat esthétique naturel. Le lifting génère souvent un excès de peau au niveau des pattes d’oie. Je le redrappe par une incision temporale dans les cheveux afin d’éviter une cicatrice visible, remontant l’implantation capillaire qui trahit le geste chirurgical.
Les paupières supérieures seront traitées en même temps, sans risque dès lors que l’on est prudent. Une incision dans le pli orbitaire naturel résèquera la peau tombante associée à la lipostructure, et au petit décollement temporal pour un effet plus rajeunissant.
Pour les paupières inférieures, il faut être très prudent. L’idéal dans son cas sera d’enlever les poches par voie transconjonctivale (par l’intérieur, sans ouverture de la peau) et de corriger le léger excès de peau par une lipostructure en même temps que le comblement de la vallée des larmes et du haut des pommettes.
Au niveau du cou, une incision sous mentale (sous le menton) invisible permet de rapprocher les cordes platysmales, qui après avoir retendu les muscles platysmaux, redessinera l’ovale et l’angle cervico mentonnier, en « chargeant » la graisse des « bajoues » en masse et en la refixant sous le SMAS, verticalement. La plénitude de l’ovale et des joues sera meilleure.
Le choix de la position des cicatrices est primordial. Longtemps après mes séjours américains, je pratiquais une incision rétro-tragienne, plus rassurante en apparence (cicatrice dans l’oreille).
Mais, la peau dans l’oreille est très fine, et même si la technique de fixation de celle-ci, à cet endroit, pour éviter le déplacement du tragus en avant est classique, chez une fumeuse, le risque de nécrose est réel. Celui de blesser ce cartilage très fin également.
Comme le font les chirurgiens brésiliens (Dr Pitanguy, le meilleur chirurgien selon moi, comme mon ami chirurgien star de Los Angeles, le Dr Nassif) je préfère respecter les plis naturels. Au bout de quelques semaines, en prenant soin de respecter « la tension sur le lobe de l’oreille » les cicatrices deviendront invisibles. En arrière elles sont placées dans le pli de l’oreille.
Pour arrêter de fumer, je lui conseille quelques séances d’hypnose et de se « patcher ». Le manque sera moins difficile juste après l’intervention. Et au bout de 2 semaines le résultat esthétique la confortera dans sa détermination de se donner toutes les chances de garder un bon résultat.
Finalement la technique et le programme opératoire sont désormais parfaitement acceptés par Mathilde. Le devis est détaillé, la date opératoire confirmée, le rendez-vous avec l’anesthésiste est pris. Les risques, ont été énumérés. Les blessures nerveuses, les nécroses, les hématomes graves, les infections sont maitrisées.
Il n’y a donc pas une seule technique, mais une multitude de gestes à disposition. Le meilleur chirurgien est celui qui les connaît, les a pratiqués, a fait ses choix, souvent en simplifiant. Choix personnel, mais toujours en relation avec l’indication opératoire, c’est à dire selon l’aspect du visage. Le meilleur chirurgien de Bordeauxpeut parfaitement maitriser une technique qui, si elle n’est pas adaptée au cas de sa patiente, ne donnera qu’un résultat médiocre.
Enfin toujours penser au risque d’œil rond, et de déplacement du lobe de l’oreille qui doit être la hantise du chirurgien (« primum non nocere » / « avant tout, ne pas nuire »). Fort de toutes ces explications (que toutes les patientes ne veulent pas connaître par inquiétude et stress), le bon choix, la maitrise du geste chirurgical et la confiance de la patiente, le résultat est prédictible. Les suites opératoires seront parfaitement assurées dans mon cabinet, Academia Aesthetica, à Bordeaux Caudéran, près du Parc Bordelais.
Le jour J : l’intervention
L’intervention a lieu un mardi matin, dans la clinique de chirurgie esthétique au sein de la clinique Tivoli Ducos. Mathilde ne fume plus depuis 5 jours. Elle arrive à 7h00 à jeun (ni boire, ni manger, ni fumer depuis minuit). Elle est accompagnée d’une amie que j’avais opérée, il y a 1 an. Avec les années, mes patientes forment une sorte de communauté amicale.
Tout s’enchaine très vite. Peu de formalités car elles ont été faites le jour de la consultation anesthésique. Passage rapide dans sa chambre, rencontre des infirmières qui vérifient la douche antiseptique, vêtements de bloc.
Le brancardier la conduit au bloc opératoire. Ma fantastique assistante et moi l’attendons ; 15 mn de conversation afin de reprendre les grandes lignes de l’intervention, s’assurer que rien de préjudiciable n’est arrivé depuis la dernière consultation. Un peu d’humour et beaucoup rassurer. C’est le grand jour, Mathilde est détendue, déterminée, en confiance. L’anesthésiste l’installe, l’ambiance est très détendue. C’est ma première opération de la journée.
Tout se déroule parfaitement. L’intervention telle que prévue aura pris 3h10. La chirurgie des paupières a été rajoutée par rapport à la demande initiale de même qu’une dermabrasion des lèvres et une lipostructure de celles-ci. Un pansement un peu conséquent mais confortable est réalisé. Passage par la salle de réveil. Mathilde est de retour dans sa chambre à 14h00.
A suivre…
Le 05/11/2019
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